mercredi 29 mai 2013

« La Chaux-de-Fonds 1904 » : Mon 1er projet pro dans le JdR



Il y a quelques temps, j’ai annoncé mon intention de devenir professionnel dans le jeu de rôle. C’était bien évidemment qu’une déclaration d’intention mais elle recouvre une vision qui est bien concrète et qui se matérialisera par des projets. Le premier d’entre eux s’appelle « La Chaux-de-Fonds 1904 ». Je ne vais pas décrire sur ce blog tous les détails du projet, pour cela vous pouvez télécharger la plaquette de présentation qui décrit le projet dans tous ses détails, notamment ses aspects budgétaires. Je vais tout de même vous donner les grandes lignes du projet.


La Chaux-de-Fonds 1904 est un projet global qui comprend :

  1. la création d’un supplément de contexte et un scénario pour le jeu de rôle Crimes (80 pages) ;
  2. la réalisation d’aides de jeu, notamment un plan interactif, et des décors ;
  3.  une tournée de parties, tout d’abord au niveau local, puis dans la francophonie.

Comme son nom l’indique, le scénario prend pour cadre une ville incontournable de Suisse à la Belle Époque. La Chaux-de-Fonds est une cité horlogère qui a connu un grand développement à cette période et qui a la particularité d’être perchée à plus de 1000 mètres d’altitude.

Je développerai et expliquerai plus tard chaque aspect du projet mais pour l’instant je vais exposer comment ce projet est une étape importante dans la professionnalisation de mon activité.

Un auteur pro ne peut pas être un vendeur de papier

Si je souhaite devenir auteur professionnel, il ne faut pas compter sur des droits d’auteur. De bonnes ventes de jeu de rôle tournent autour de 500-800 exemplaires vendus pour un livre de base. Les droits d’auteur s’élèvent rarement plus haut que 10% si l’on enlève les droits d’auteurs des illustrateurs et graphistes. Avec un jeu à 35 €, les droits d’auteur ne dépassent pas, même dans une situation idéale, 3000 €. Cela signifierait que je devrais sortir un jeu par mois pour survivre en Suisse. Un jeu ne s’écrit bien entendu pas en un mois.

Le revenu de la vente d’un jeu de rôle ou d’un supplément peut être un précieux complément dans mon activité mais il faut garder les pieds sur terre, il est impossible d’en vivre. J’ai donc réfléchi à un autre modèle qui pourrait au moins me laisser un espoir de survivre.

Un auteur peut s’autoéditer mais …

Comme je l’ai évoqué dans mon hommage à Silentdrift, j’accorde un grand intérêt à l’autoédition. C’est un modèle qui offre un meilleur revenu dans une niche économique comme le JdR car l’auteur cumule sa part d’auteur avec celle d’éditeur. Il n’est pas impossible de vivre de sa création comme créateur de JdR indépendant, certains, à l’instar de Romaric Briand, se sont lancés dans ce pari. Cette manière de procéder est très contraignante et ne peut être viable dans ma situation et mes contraintes économiques. Je vais malgré tout essayer de tendre peu à peu vers ce modèle qui, même s’il n’est pas suffisant pour me faire vivre, a le mérite d’être bien plus profitable que d’être simple auteur. Il s’agit donc pour moi d’adapter ce modèle pour le rendre viable.

Le modèle du JdR indépendant a à mes yeux trois gros défauts que je souhaite corriger : 


  1. Il isole l’auteur qui veut garder un contrôle total sur sa création. De cette manière, il laisse peu de place à d’autres partenaires qui pourraient lui être bénéfique. Attention, je ne dis pas que les collaborations ne sont pas possibles, je pense juste que les contraintes idéologiques du modèle brident de manière très forte les possibilités.
  2. Il sous-estime le travail éditorial qui est nécessaire et qui met en valeur le travail de l’auteur. Attention, je ne dis pas que les créateurs de JdR indépendant négligent l’aspect éditorial, je dis juste qu’ils mettent souvent plus l’accent sur la création que sur l’édition. Ils défendent l’idée que n’importe qui peut s’éditer. Pour ma part, je pense que l’on ne se décrète pas éditeur, on le devient. L’édition est un savoir-faire tout comme la création et l’autoédition demande les compétences pour endosser les deux casquettes. 
  3. Il sous-estime la légitimité qu’apporte un éditeur surtout lorsque l’on sort le cercle très fermé des afficionados du JdR. Tout le monde ne passe pas son temps à s’informer sur le JdR et, d’un point de vue extérieur ou dilettante, le JdR indépendant n’est que quelques farfelus qui se sont autoproclamé auteur de JdR. Attention, je ne dis pas que les JdR indépendants ne peuvent pas acquérir une légitimité à terme mais cela prend du temps et beaucoup d’énergie, bien plus qu’avec un éditeur.

La Chaux-de-Fonds 1904 sera édité par les Ecuries d’Augias pour ces trois raisons. Le projet se veut ambitieux et j’ai besoin de l’aide d’un éditeur compétent et reconnu. Il me semble essentiel de fédérer autour du projet et, pour cela, je veux laisser un espace à tous les partenaires qui souhaitent participer. Je partage volontiers mon bébé. A ce titre, je lance un appel à tous ceux qui souhaitent participer au projet, tous les partenariats sont possibles, il y a de la place pour tout le monde et chacun aura sa part des retombées. Contactez-moi.

A ce titre, il serait bête de ma part de gâcher le projet en me proclamant éditeur. J’espère apprendre ce métier mais je n’ai pas envie de faire mes premières armes sur un projet aussi ambitieux. La Chaux-de-Fonds 1904 nécessite également une légitimité pour m’adresser aux institutions publiques. Un contrat d’édition est une condition sine qua non dans de nombreux cas pour adresser une demande de subventions.

Autoédition ou projets d’envergure ?

Après ces premiers paragraphes, on peut légitimement se dire que je manque de cohérence. D’un côté, je dis que je souhaite tendre vers l’autoédition et que je considère que c’est la méthode qui a le plus de chance de me faire vivre un jour, d’un autre, je présente mon premier projet d’envergure qui n’est pas adapté à ce modèle.
Je vais vous répondre que Rome ne s’est pas faite en un jour. Mon activité sera faite de gros projets tel que La Chaux-de-Fonds 1904 et de plus petits projets que j’autoéditerai. Les premiers serviront à me faire connaitre du grand public, ils forgeront petit à petit ma propre légitimité auprès du public dans son sens très large. Les seconds me permettront d’apprendre le métier d’éditeur. Petit à petit, je me montrerai plus ambitieux dans mes projets autoédités, mais je ne veux pas griller les étapes. Mon modèle économique se veut évolutif, il ne suivra pas une idéologie mais se construira petit à petit au gré des projets, succès ou échecs.

Je n’ai de loin pas fait le tour du sujet. Je continuerai à expliquer mon modèle économique dans de prochains billets donc n'hésitez pas à me poser vos questions.

jeudi 23 mai 2013

Silentdrift : ma part d’héritage



Ça a été annoncé officiellement : Silentdrift, le forum desjeux de rôle indépendants, fermera cet été. Pour certains, dont je fais partie, c’est une page du jeu de rôle qui se tourne. Cette plateforme de discussion et de travail n’est de loin pas anecdotique même si son public a toujours été restreint. Je ne vais pas m’atteler à parler de tout ce qu’a pu apporter Silentdrift au le JdR francophone, mais plus humblement je me contenterai de faire mon bilan personnel et de ce que le forum m’a apporté.


Pour ma part, Silentdrift c’est une personne, son modérateur Christoph. Il n’est pas n’importe qui à mes yeux. Il est un ami de jeunesse, un ancien voisin, le MJ qui m’a fait découvrir le JdR. Cette passion commune nous a beaucoup rapprochés. Il m’a fait découvrir les JdR indies américains avant même qu’on en parle en Francophonie et c’est le premier qui m’a fait réfléchir sur le fonctionnement du JdR. Ça a été pour moi une révolution.

J’ai suivi Silentdrift depuis ses tout débuts. A l’origine, le forum possédait une section privée pour notre groupe d’ami. On y planifiait nos fêtes pour répondre à des questions aussi essentielles comme « Qui se charge de l’alcool ». J’ai donc longtemps suivi la partie JdR du forum d’un œil. Je suivais les discussions et quand je pensais avoir quelque chose d'intelligent à dire, je répondais.

A présent, notre forum privé existe à une autre adresse et le fonctionnement du forum de JdR s’est peu à peu affirmé. Avec beaucoup de travail et de réflexion, Christoph a mis en place l’étiquette et l’esprit général qui fera réellement tout le sel et la différence de Silentdrift. Loin de poser problème, les règles ont mis un cadre pour discuter et de travailler et ma participation s’est intensifiée. J’ai commencé à commenter les rapports de partie et à développer mon propre jeu : Romance érotique. C’est une période dont je garde d’excellents souvenirs et c’est aussi à ce moment que j’ai tissé des liens avec d’autres auteurs : Romaric et Frédéric, puis Fabien un peu plus tard. D’autres ont suivi depuis.

Ensuite, j’ai travaillé sur des projets extérieurs, j’ai également publié Romance érotique chez un éditeur. Je me suis éloigné de Silentdrift un peu malgré moi. Il n’empêche que je vais chaque jour contrôler les nouveaux messages du forum. Je les lis, je ne réponds que lorsque je pense avoir quelque chose à apporter. Je participe particulièrement à la rubrique publication où j’ai encore beaucoup de choses à apprendre. Il me faut également faire part de mon expérience sur la publication de Romance érotique, ça me semble naturel. Je prépare d’ailleurs un rapport de publication conséquent pour la fin juin. Ce sera mon dernier fil sur le forum. C’est amusant car j’ai l’impression que la fermeture du forum correspond exactement au début du nouveau chapitre que je débute dans ma création.

Silentdrift m’a beaucoup apporté et, en premier lieu, il ne s’agit pas du forum à proprement parler. Il s’agit de Christoph qui m’a ouvert les yeux et qui m’a fait découvrir toute la diversité de ce que peut être le JdR. Nos discussions sans fin devant chez mes parents ou sur skype… Ma vision créative en est changée à jamais. Merci amigo.

J’y ai également trouvé des alter egos qui m’ont permis d’approfondir ma soif de théorie : Fred… Des podcasteurs qui habitent une baro en Bretagne qui sont pleins de bons conseils avec qui je peux parler de ma vision créative sans préjugé (quitte à se faire traiter de fou border line) : Rom et Flavie… Des compagnons avec qui l’on peut débattre et aller au fond des choses, ils m’ont élargi mon horizon de créateur : Fabien… Des guides attentionnés qui m’ont fait découvrir de bien charmants bouchons lyonnais : Adrien et Natacha…

La méthode de travail initiée par le forum est celle vers laquelle j’essaye de tendre au maximum. Elle se nourrit d’échanges et de jeu. C’est le forum où véritablement la partie de JdR est vraiment mise à l’honneur. Ça pousse à jouer et à découvrir. Quel bonheur de travailler en jouant et en échangeant.

Mais que dire de ces JdR indépendants si caractéristiques du forum ? Je n’ai publié aucun jeu indépendant, il paraitrait que je fasse parfois mon Calimero à ce propos. Alors aussi surprenant que cela puisse paraître, j’ai beaucoup retenu de l’édition indépendante. La première chose est qu’elle est bien plus rentable pour l’auteur tout en étant très accessible. Je considère d’ailleurs que l’autoédition est l’unique moyen pour un auteur de véritablement vivre de sa création. Ce constat, je le dois à Silentdrift avant tout même si d’autres discussions et événements m’ont confortés dans cette idée. 

A présent que je souhaite me professionnaliser, l’autoédition sera l’option prioritaire et il faudra des raisons véritablement béton pour lâcher mes droits. Évidemment, je parle d’autoédition plutôt que d’indépendance car ma vision est différente du forum et il est important de distinguer les choses. J’envisage par exemple des coéditions ou toute autre forme de collaboration mais le cœur du concept (du moins à mon avis) reste : l’auteur doit participer au risque éditorial et à ses retombées financières et il doit garder un contrôle sur l’avenir de sa création. C’est également le meilleur moyen d’organiser sa création dans une perspective globale cohérente avec une démarche créative d'auteur.

Je garde tout cet héritage précieusement. Je vais à présent tracer ma propre voie à côté, mais jamais très loin, de ceux qui poursuivront dans les traces du « JdR indépendant ». Silentdrift m’a servi de modèle, non pas pour le copier à l’identique, mais pour m’en inspirer et me l’approprier. C’est ce que j’ai réalisé et c’est un trésor. Sans Silentdrift, je n’aurais sans doute jamais envisagé de me professionnaliser.

Merci Christoph pour tout ce que tu as fait pour moi et pour plein d’autres. Ton engagement a changé des vies.

lundi 13 mai 2013

Swiss Made JdR n°3

Après de longs mois sans nouveautés, j'ai l'immense plaisir de vous présenter le tout nouveau numéro de la revue.  Il clôt la première saison de Swiss Made JdR. Il y aura en principe une seconde, je vous en reparlerai sans doute sur le blog.

Swiss Made JdR Numéro 3 : mai 2013

Sommaire :
- Editorial : Chose promise...
- Interview : 2dSF seconde édition
- Test : IchorPunk
- Reportage : Dice Night (3ème partie et fin)

TELECHARGEMENT N°3
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Vous pouvez également télécharger les anciens numéros sur cette page.

mercredi 8 mai 2013

Amateur ou professionnel, il y a une différence

Après l'article "Je serai un professionnel du JdR", je poursuis mes réflexions sur la professionnalisation dans notre hobby. Je dévoilerai ainsi peu à peu mes intentions et mes projets qui, je l'espère, me permettront d'en vivre.

Dans le jeu de rôle, la différence entre amateurs et professionnels est floue et elle est d’ailleurs souvent minimisée dans les discussions. Pour ma part, j’ai longtemps considéré qu’il n’y avait aucune différence entre les professionnels et les amateurs « ambitieux » ou « de talent ». J’avais constaté que le fanzine amateur du Souffre-Jour est, sous de nombreux aspects, bien meilleur que certains suppléments de la gamme officielle Agone. Avec ForgeSonges également, nous étions une association d’amateurs qui a sorti des jeux de qualité reconnue : Les Ombres d’Esteren, Mississippi, etc. La plupart des projets rassemble également des amateurs et des professionnels, souvent des auteurs amateurs et des éditeurs professionnels.


Donc la différence entre amateur et professionnel n’est définitivement pas la qualité des projets, elle est ailleurs. On peut également se poser la question de ce qui changera pour moi lorsque j’aurai un statut officiel et légal d’indépendant. Jusqu’à présent, j’étais enseignant à temps plein ou partiel et je m’investissais dans mes larges temps libres pour organiser les Démiurges, rédiger la revue Swiss Made JdR, écrire des jeux de rôle, aller en convention, etc. Cet automne, j’assurerai un mandat d’historien à temps partiel (voici la description du projet pour les curieux, je ne m'étendrai pas dessus ici car ce n'est pas le sujet du blog) et je ferai mes activités de JdR à côté. D’un certain point de vue, je ne fais que remplacer mon activité rémunératrice d’enseignant par une autre. De plus, il est certain que j’aurais aussi finalisé comme amateur les projets qui servent à présent de rampe de lancement à mon activité indépendante.

Et pourtant, à mes yeux, ma situation évolue drastiquement. La différence est avant tout mentale et organisationnelle. C’est toute la démarche qui diffère. Je ne dis pas que l’on devient plus sérieux en devenant professionnel car j’ai toujours été très sérieux dans tout ce que j’ai entrepris dans le jeu de rôle. Jusqu’à présent, ma vie professionnelle et mes créations (JdR et histoire régionale) étaient clairement délimitées. J’ai bien fait du JdR en classe et je suis professeur d’histoire mais l’intégration entre mes diverses activités n’était pas satisfaisante, voir stressante. Finalement, ma vie professionnelle créait des contraintes qui empiétait sur mes activités de créateur et de chercheur. Inversement ma passion empiétait parfois sur la qualité de mon travail et sur ma qualité de vie (retard dans les corrections, fatigue et surmenage).

La grande révolution pour moi est donc avant tout d’avoir l’ambition de mettre mes passions au centre de mes activités. J’ai acquis depuis Pâques une certaine sérénité et j’ai enfin l’impression que je fais ce que j’ai profondément envie de faire. Mes activités professionnelles s’intègrent enfin à ma vie et elles sont, déjà maintenant, en train d’entrer en résonance et de devenir un tout cohérent. Il faut également dire que depuis que je suis clair sur ma future professionnalisation et que je les ai rendues publiques, je suis plus proactif et des collaborations se profilent déjà avec différents partenaires. Comme amateur, à chaque nouveau projet, j’avais le souci d’évaluer « si ça n’allait pas empiéter sur mon travail » ; comme indépendant, lorsqu’un bon projet montre le bout de son nez, je m’enthousiasme en me demandant « comment l’intégrer à mes autres activités ». Car finalement, la professionnalisation rend possible une plus grande ambition, j’aurai une liberté d’organisation maximale et la possibilité de déterminer mes priorités de travail.

Je n’idéalise pas non plus mon nouveau statut. Il y a également des contraintes, financières avant tout. La professionnalisation induit une obligation de rentabilité globale de mes projets, au moins pour manger et payer mes factures. Il faudra donc plus rationaliser le travail et, même s’il est toujours possible de faire des projets créatifs fous et sans logique économique, il faut assurer derrière avec des projets plus « payants ». De plus, toutes les activités qui étaient jusqu’à maintenant strictement récréatives comme les conventions acquièrent une nouvelle dimension plus sérieuse. Ça fait un petit peu bizarre d’y penser.

Ce n’est ici que mes premières impressions depuis que je me suis décidé. Sans doute que la réalité est bien plus complexe que cela et que je me projette avec plein d’illusions, mais je voulais partager cette réflexion basée sur mon ressenti. Et vous comment vivez-vous ou imaginez-vous la différence entre amateur et professionnel ?

jeudi 2 mai 2013

Je serai un professionnel du jeu de rôle


Un titre bien particulier et, d’une certaine manière, racoleur pour cet article car depuis que j’ai la chance d’être auteur dans le jeu de rôle (Le Souffre-Jour, 2007), j’ai toujours entendu dire :
« Il n’est pas possible de vivre de la création de jeu de rôle. » 
« Les gens qui en vivent se comptent sur les doigts d’une seule main. »
 « Le JdR est un marché de niche qui ne fait plus vivre grand monde. »

Toutes ces affirmations sont globalement vraies et je ne vais pas les remettre en question. Il n’empêche que j’ai pris une décision importante avant Pâques 2013 : je vais devenir un professionnel du jeu de rôle. Je ne vais pas ici présenter ici mon business plan pour espérer un revenu de mon activité car il n’est pas encore établi précisément. J’ai bien des idées et des projets concrets qui me serviront de base au modèle économique que je souhaite mettre en place, tout ceci fera l’objet d’un article en temps voulu. Je vais plutôt parler de mon parcours et ce qui m’a poussé à prendre cette décision.
Au niveau professionnel, j’ai une formation d’historien et géographe complété par une formation pédagogique pour le niveau secondaire II. Depuis la fin de mes études, j’ai toujours travaillé dans l’enseignement avec quelques périodes de chômage ponctuelles pour faire le pont entre deux places de travail. Je pense être un enseignant qui n’est pas trop mauvais, j’ai du moins toujours donné satisfaction à mes employeurs. Si j’ai enchaîné plusieurs postes, c’était toujours choix personnel car je ne m’y sentais pas très bien.

Le salaire d’enseignant est confortable surtout lorsque l'on garde un train de vie d'étudiant, ou presque, comme moi. Je ne me prive de rien mais j’ai gagné pendant plusieurs années plus d’argent que je n’en dépense. J’ai à présent quelques économies.

Dans mes loisirs, j’ai passé des heures et des jours pour la création de JdR. J’ai commencé dans le fanzine Souffre-Jour qui m’a appris à écrire, puis j’ai poursuivi avec l’association ForgeSonges et le forum Silentdrift  ce qui m’ont appris à créer des jeux de rôle. Ainsi, à côté de mes activités, j’ai participé à quelques publications, j’ai dirigé une équipe de création de jeu de rôle pour Billet Rouge et j’ai créé de A à Z mon propre jeu Romance Érotique. Je suis devenu un auteur amateur reconnu (ou remarqué) et j’ai passablement exploré la niche du JdR et ses particularités.

Les astres se sont alors alignés pour moi. D’un côté, mon activité d’enseignant ne me satisfaisait plus suffisamment et j’avais un petit peu l’impression que j’avais fait le tour au niveau créatif dans mon loisir. Cela ne signifie pas que je n’ai plus d’inspiration et que je ne souhaitais pas créer de nouveaux jeux. C’est simplement que le statut d’amateur apporte des satisfactions : découvrir les choses, publier son bébé, rencontrer de nouvelles personnes. Mais il m’en faut plus, il me faut de nouveaux défis, je souhaite être de plus en plus ambitieux dans mes projets de création. Et pour ça, bricoler le soir après le travail ou le week-end, ça ne suffit plus. Je devais passer à la vitesse supérieure si je voulais encore créer avec autant de plaisir.

Mais ce qui m’a convaincu de sauter définitivement le pas, c’est un mandat d’historien qui débutera à partir de cet automne. Celui-ci m’assurera le minimum vital pendant plus d’une année, tout en me donnant une flexibilité de travail extrême. C’est une activité qui s’accorde parfaitement avec celle de création de JdR. J’ai donc décidé de me lancer comme « historien et game designer » indépendant[1]. J’ai donc démissionné de mon travail d'enseignant (je termine le semestre tout de même) et je ne me consacrerai alors exclusivement qu'à mes créations de jeu de rôle et à la mise en valeur du patrimoine.

On peut me croire optimiste ou doux rêveur. Mais je crois que c’est exagéré. J’ai rencontré et échangé avec des auteurs qui se revendiquent professionnels comme Romaric Briand ou Brand. Nous avons discuté et j’ai pu évaluer les difficultés qu’ils rencontrent. Elles semblent nombreuses mais je ne les estime pas insurmontables. J’ai également fait le choix comme historien d’avoir une activité différente mais complémentaire au JdR. Ce n’est pas uniquement pour des raisons financières que je diversifie mes activités : l'histoire est également ma passion au même titre que le JdR.

Et finalement, qu’est-ce que je risque ? Je ne vais pas m’acharner dans une activité indépendante jusqu’à ce que je sois ruiné et condamné à vivre sous les ponts. Je me suis laissé une année pour tenter ma chance, je ferai mon premier bilan après une année. C’est peut-être la crise de la trentaine mais c’est aussi sans doute le dernier moment de me lancer avant que des responsabilités familiales viennent éclairer mes nuits. Souhaitez-moi bonne chance.



[1] Il s’agit d’indépendance économique au sens du statut juridique professionnel qui y est rataché en Suisse.